lundi, avril 13, 2009

Numéro# le choc du deuxième disque

Après un premier disque concept bourré de bombes électro-pop et de phrases slogans se moquant avec autodérision du vedettariat, le duo montréalais Numéro# a enfilé les gants de boxe pour se faire violence et créer Sport de combat, un deuxième album plus éclectique et plus personnel.

Le changement était plus que le bienvenu pour Numéro#. Le chanteur et auteur d'origine bordelaise, Jérôme Rocipon, et le compositeur Pierre Crube ont beaucoup fait parler d'eux depuis la parution de L'Idéologie des stars, en 2006, qui mélangeait chanson et musique de club. Après un début intime sur MySpace, la pièce Chewing-gum fraise, en duo avec Omnikrom, les a mis sur la carte. Les titres Monique, un clin d'oeil à Monique Giroux, et J'aime la bourgeoisie leur ont aussi permis d'attirer les regards des médias et du public sur eux.

Après avoir reçu le Félix du meilleur album électronique ou techno en 2007, vendu près de 7500 copies et donné des concerts au Canada, aux États-Unis et en Europe, le duo avait bien hâte de tourner la page et de faire autre chose que de remâcher son album concept. «À la base, Pierre avait déjà remixé mes morceaux pour créer l'album, puis il les a remixés quelques fois pour les concerts. C'est comme ingurgiter et ingurgiter encore et encore», explique Jérôme, une fine cravate autour du cou. «En plus, L'idéologie, c'était un excès de clichés juxtaposés, c'était tellement homogène», ajoute Pierre, le maître des sonorités de Numéro#.

Mais créer ce deuxième disque ne s'est pas avéré si simple pour les deux amis. Syndrome courant du deuxième disque et des attentes qui viennent avec lui, il y a eu un blocage de quelques mois, où chaque note composée amenait sa remise en question. «On a créé avec une certaine angoisse, avoue Crube. Je partais un synthétiseur et dans ma tête j'avais une image de moi en concert, devant un public... et là je bloquais. Est-ce que les gens allaient aimer ça? C'est con, il ne faut pas y penser, mais... » Devant lui, Jérôme hoche la tête en signe d'approbation. «C'est un peu pour ça que le nouveau disque s'appelle Sport de combat, parce que vraiment, ç'a été dur de se sortir de ça. On s'est fait violence pour s'assumer et faire ce dont on avait envie. Point.»

Égoïsme et éclectisme
Une fois les angoisses évanouies, Numéro# s'est retroussé les manches et a pondu un disque musicalement plus éclectique, un brin moins dansant mais moins lassant, où on peut même entendre une espèce de ballade rock «avec de la guitare!». «La seule chose qui nous a guidés, c'est qu'on voulait se faire plaisir, c'est un disque un peu égoïste sur certains points, lance Jérôme. Pierre a testé plein de sons, il n'a pas eu peur d'explorer, même si on est toujours dans la marque de commerce de Numéro#, près de la formule et du caractère "catchy". On est à l'aise avec notre caractère pop.»

Numéro# vit aussi une petite révolution du côté des paroles, où Rocipon, toujours avec ce ton récité et faussement hautain, prend un virage beaucoup plus personnel. Le «je» de son personnage sur L'Idéologie des stars devient maintenant le «je» du chanteur avant qu'il n'enfile son costume. «C'était tout nouveau pour moi d'oser écrire comme ça. Mais les pistes sont quand même un peu brouillées, je trouvais nécessaire de mettre un écran, et surtout de ne pas trop parler de mon quotidien.»

Marqués de critiques, de ressentiments et d'angoisses, les textes de Sport de combat reflètent l'état d'esprit du chanteur. «2008 a été l'année où pas mal de choses ont macéré sur le plan personnel comme avec Numéro#, et il a fallu que ça sorte, explique Rocipon. Je ne veux pas que mes proches le prennent personnel, mais bon, on vit dans une époque emmerdante.» Pierre rigole: «C'est un disque d'époque de crise!» Toujours fort pour les slogans, Jérôme relance: «Vivez l'austérité avec Numéro#!»