mardi, octobre 20, 2009

Les Trois Accords - Bien dans la peau des autres


















Les amateurs de musique sérieusement absurde ont de quoi sourire cette semaine puisque la formation Les Trois Accords, porte-étendard québécois du genre depuis 2004, revient à la charge avec un troisième disque, Dans mon corps, dont la trame de fond est le jeu identitaire.

Thématique, Dans mon corps? Pas tout à fait, mais l'album contient son lot de textes au «je» dont le protagoniste est une fille, par exemple, en plus de mettre en scène plusieurs personnages déguisés, sexuellement équivoques, ou alors portant des vêtements qui ne sont pas les leurs. L'ambiguïté au service du rire, quoi.

Et le premier morceau du disque, la pièce-titre, donne le ton. Après une introduction du type fanfare d'école secondaire, Simon Proulx, à la voix haut perchée, chante sur une mélodie accrocheuse: «Je me suis rasé les aisselles en pensant à toi / j'étais fatiguée d'être celle que tu ne voyais pas / [...] Dans mon corps de jeune fille, il y a des changements». Ailleurs, sur La Lune: «Je porte parfois tes vêtements / Quand je cherche un peu de réconfort / Je me sens bien quand ta camisole me pète sur le corps.»

Rencontrés dans leur local de répétition, assis dans de gros sofas moelleux, Proulx, Alexandre Parr, Pierre-Luc Boisvert et Charles Dubreuil éclatent de rire quand on leur dit que tout ça ressemble à quelque chose comme un coming-out. «Y'a beaucoup de textes à la première personne, y'a beaucoup d'interprétation, de jeux des genres, et si c'est rigolo, c'est parce que c'est déstabilisant», raconte le chanteur, qui écrit les textes des Trois Accords. C'est aussi le lien avec la pochette de Dans mon corps, qui a plutôt l'air de celle d'un chanteur soul afro-américain. Tant qu'à jouer le jeu, aussi bien le jouer à fond!

Nouvelle formule
Parlant d'identité, Les Trois Accords montrent un nouveau visage sur ce troisième disque. En fait, il montre un visage de moins, puisque Olivier Benoît occupe maintenant le poste de gérant, laissant toute la ligne vocale à Simon Proulx, qui a tout de même dû ajuster quelques pièces, conçues en fonction de la présence d'une seconde voix plus grave.

Après le succès presque hors normes de leur premier disque, Gros mammouth album, écoulé à environ 200 000 exemplaires -- grâce à Hawaïenne --, et la réussite plus réaliste de leur second effort, Grand champion international de course (environ 70 000 exemplaires), Les Trois Accords et le réalisateur Gus Van Go (Vulgaires Machins, Chinatown, Priestess) ont opté pour une musique moins country et moins «punk», levant le pied sur la pédale de distorsion et ajoutant quelques cuivres. «L'idée était d'aller vers des prises plus simples, mais avec des sons plus riches et plus profonds. Profonds et délicieux», dit en rigolant le guitariste Alexandre Parr.

Si les quatre amis n'osent pas trop se fixer d'objectifs de vente -- à quel point le téléchargement peut leur nuire? --, ils ont très hâte de tester ces nouvelles chansons devant public. Charles, le batteur, ouvre les mains et regarde ses collègues. «J'ai juste hâte de voir le monde, des gars de shop, embarquer dans notre trip et chanter "dans mon corps de jeune fille, il y a des changements"!»