mercredi, décembre 27, 2006

2006 vu par Mononc' Serge

Le chanteur Mononc' Serge profite de la pause entre Noël et le jour de l'An pour faire une série de spectacles à Montréal, Sherbrooke et Québec sous le titre rassembleur «Ent' deux dindes». Comme Mononc' est un des piliers de la scène alternative du Québec -- il a quand même sept albums en poche -- et comme il est aussi un des artistes qui cultive le plus son indépendance, nous avons cru bon avoir son point de vue sur certains événements culturels et politiques qui ont marqué l'année. Une texte de Philippe Papineau

Le Devoir: Dans ta chanson Noël est un jour comme les autres, de ton plus récent disque Serge blanc d'Amérique, tu chantes: «Et si Noël pour nous autres, c'est l'apothéose de notre insignifiance, console-toi en pensant que pour le nèg' en Afrique c'est un autre jour d'indigence.» Pourquoi alors faire des spectacles dans ce temps de l'année?

Mononc' Serge: C'est vrai que c'est une chanson qui a un certain impact, même si l'enrobage est assez... graisseux! Mais je ne fais jamais de spectacles qui ont des connotations des Fêtes, c'est seulement des shows que je fais pendant les Fêtes. Moi je vois ça comme une façon pour les gens de sortir du contexte familial. Après quatre jours de fêtes de famille, ça fait du bien de se retrouver dans un party.

Le Devoir: Tu as appelé ton spectacle «Ent' deux dindes». Est-ce un clin d'oeil aux commentaires de Charlebois sur la relève musicale au Québec?

Mononc' Serge: Non, ce n'est pas une référence à Charlebois. J'avoue que, cette année, je n'ai pas trop suivi toute l'activité autour de la scène locale. J'en fais partie, mais je fais ma petite affaire dans mon coin.

Le Devoir: Mais est-ce que ce tu ne trouves pas ça rassurant de voir réussir un chanteur comme Pierre Lapointe, ou un groupe comme Malajube?

Mononc' Serge: J'ai lu dans le journal que cette année, c'était l'âge d'or de la musique... Dire que l'âge d'or de la musique au Québec, c'est Pierre Lapointe et Ariane Moffatt... bof! Je ne veux rien leur enlever, mais ce ne sont pas des affaires qui me touchent. Y'a aussi plusieurs groupes rock que je trouve très bons, mais qui ne réussissent pas à joindre les deux bouts!

Le Devoir: Et toi dans tout ça?

Mononc' Serge: Je reste un des artistes qui marche le mieux, peut-être pas dans l'ultime peloton de tête, mais pas loin. Mais c'est dur de savoir comment les autres font vraiment. Ils sont très bruyants sur leurs succès, mais très discrets sur leurs insuccès. Y'a des chanteurs qui gagnent des trophées à l'ADISQ et qui vont jouer à Trois-Rivières devant 60 personnes. Y'a beaucoup de poudre aux yeux.

Le Devoir: Parlant de gala, que penses-tu de l'arrivée cette année d'un nouveau gala pour la musique indépendante, le GAMIQ?

Mononc' Serge: Je ne suis pas très enthousiaste à l'idée des galas en général, mais je reconnais que ça peut aider des personnes à avoir de la publicité, et ça peut aider la scène locale dans son ensemble à rayonner. Je suis allé au GAMIQ même si j'avais à peu près pas de chances de gagner, car j'étais en compétition contre les Malajube, Karkwa et compagnie. Mais je me suis dis que si je gagnais, ça serait un peu comme Stéphane Dion qui réussit à se faufiler entre les favoris!

Le Devoir: Toi qui es souverainiste et qui a souvent varlopé les politiciens, que penses-tu du nouveau chef du Parti libéral?

Mononc' Serge: Je ne pense pas que ça soit une bonne nouvelle pour l'accession du Québec à l'indépendance. Stéphane Dion est quelqu'un d'"articulé", de brillant. Et je pense que ça sera un adversaire redoutable pour les souverainistes. C'est toujours quelqu'un qui a des arguments pour appuyer ce qu'il dit, il ne tombe pas dans les attaques personnelles. J'essaie d'imaginer un duel entre lui et André Boisclair, et j'ai beaucoup de difficultés à concevoir Boisclair vainqueur.

Le Devoir

- Mononc' Serge et son Sarge Jazz Band seront le 27 décembre au Café du Palais à Sherbrooke, le 28 décembre au Petit Campus à Montréal et le 30 décembre au Bal du lézard, à Québec.

***
Publié dans Le Devoir du 27 décembre 2006