vendredi, octobre 08, 2010

Jérôme Minière: Valse entre réalité et fiction

À 38 ans et après une quinzaine d'années de métier, Jérôme Minière vient probablement de livrer son meilleur travail musical avec Le Vrai le faux, un disque accrocheur et rythmé qui nous fait penser au Minière des jeunes années. Avec ce nouvel album et avec la drôle de promotion qui l'a précédé, le discret mais bouillonnant créateur jongle avec la réalité et la fiction.

Depuis plusieurs semaines, le natif d'Orléans a offert sur son site Web des capsules animées racontant avec beaucoup d'humour les processus plus ou moins farfelus de la création et de la mise en marché de son disque. Du choix des vedettes invitées (Lady Gaga? Sting? Stevie Wonder?) jusqu'à sa garde-robe, tout y est passé, avec beaucoup de dérision.

«C'est une mise en abîme, c'est de la promotion à propos de la promotion, et dont le contenu est de l'antipromotion, analyse en rigolant Jérôme Minière, au bout de la longue table de réunion de La Tribu, sa maison de disque. En même temps, c'est une tribune d'expression poétique, je ne me suis jamais senti aussi libre d'exprimer des choses personnelles.»

Avant la création de Le Vrai le faux, l'auteur-compositeur-interprète s'est plongé dans une réflexion sur l'industrie de la musique actuelle, et les pirouettes que doivent faire les musiciens pour attirer l'attention des consommateurs. «Le métier est en train de souffrir, et la réflexion, c'est: est-ce que moi aussi je dois arriver à faire un grand cirque pour arriver à continuer? Je ne demande pas d'être Lady Gaga, je veux juste continuer à faire mon métier et à élever mes deux enfants!»

Reconstruire les souvenirs

Le concept des capsules ne se retrouve presque pas sur Le Vrai le faux, exception faite de la pièce titre et de l'excellente Rien à vous dire: «J'avais tout prévu pour réussir / Mais je n'avais rien à vous dire». «Le vrai et le faux, c'est aussi nos souvenirs, qui sont souvent des fabrications. Ils se reconstruisent. Les souvenirs de mes 5 ans ne sont pas les mêmes aujourd'hui que les souvenirs que j'en avais à 25 ans. C'est sans cesse réinterprété et reconstruit. Y'a des beaux films là-dessus, comme Valse avec Bachir.»

Si Minière a régulièrement replongé dans ses souvenirs d'enfance sur ses précédents disques, c'est maintenant son adolescence qui refait surface, sur le plan des textes, mais aussi beaucoup sur le plan de la musique. Jadis amateur de musique électronique et de danse, Minière avait viré folk sur Coeurs et Petit cosmonaute. Pour Le Vrai le faux, il a ressorti des musiques de la fin des années 1980, début 1990.

Bombes pop
«C'était comme revenir dans un endroit où je n'étais pas allé depuis 20 ans, mais avec mes bagages d'aujourd'hui.» Et le résultat est hyperefficace. Avec les guitares électriques, les claviers et la boîte à rythmes comme instruments de bases, Jérôme Minière a construit des bombes pop sans toutefois perdre son regard unique, cynique et tendre à la fois. On peut y entendre le clavier du Français Albin de la Simone et la voix de Bïa et de Ngâbo.

«Étonnamment, les premiers morceaux sous le titre de travail La Traversée étaient très folk, confie Minière. Mais peut-être que j'étais au bout de ce cycle-là. Sur 15 ans, tu ne peux pas aligner des disques et tous les aborder de la même manière. C'est comme la vie de couple, si tu fais de la même façon, ça ne marche pas!» Le musicien a alors recommencé à mettre des rythmes, donnant plus de muscle à ses pièces, tout en les gardant simples, voire épurées. «Je voulais raccourcir les structures, être plus direct, enlever des intros, enlever des complications, enlever quoi! Souvent, je me disais que pour être crédible, pour être intéressant, il fallait en rajouter. Il fallait que ce soit plus compliqué, plus mystérieux, labyrinthique.»

Sur scène
Il faudra attendre le 17 décembre, à La Tulipe, pour voir Jérôme Minière défendre Le Vrai le faux sur scène. Il jouera pour l'occasion avec ses fidèles alliés Denis Ferland et José Major, et a également engagé le claviériste Alex McMahon (Le Golden, Plaster, Ariane Moffatt, Yan Perreau). «Je voulais une bête de clavier, dit Minière. Et c'est un peu un défi, car José et Denis n'ont amais joué avec lui. Ça nous brasse un peu!»